Dernièrement, le programme de fidélité Miles&Blues d’Air Napoléon a été amélioré. Ou plutôt, le service marketing en charge de le promouvoir a annoncé des évolutions merveilleuses au bénéfice de ses membres. Chacun jugera de l’impact comptable, pour sa situation particulière, qui découle de ces modifications, mais chacun devrait aussi aboutir à la même conclusion : il n’y a aucun service nouveau.
L’évolution relève uniquement d’un reparamétrage de règles, que ce soient celles de report des miles statuts d’une année à l’autre, les prétendus merveilleux bénéfices n’étant alors que de temporaires effets de seuil. Il y a vraisemblablement aussi quelques règles additionnelles, histoire de croître en complexité, donnant la possibilité d’acheter les taxes d’aéroport avec des miles plutôt que des euros, sachant qu’on peut par ailleurs acheter des miles avec des euros, et que les taxes sont en fait pour une grande part des surcharges inventées pour faire payer des euros sur des billets acquis avec des miles. Ouf.
Je ne suis pas un grand fan de la multiplication des règles, encore moins des effets d’annonce à chaque fois qu’on les reformule. Avec des chiffres et des règles, on peut inventer n’importe quoi. Comme ce contrôleur de la Société Monopolistique des Chemins de Fer qui, pour répondre à une passagère mécontente de se retrouver à contresens sur le trajet Charleville-Paris a, durant le trajet, modifié l’affichage lumineux des numéros de siège dans la rame. Certes, la place 26 se retrouvait ainsi dans le sens de la marche, mais il a fallu beaucoup de persuasion à Madame Contresens pour démontrer au Monsieur qui s’y était assis qu’il n’était désormais plus en place 62, et était donc prié de se déplacer. Et par un artifice d’affichage, tous les passagers ont ainsi permuté leur place, et leur sens, sans qu’à la fin des opérations il y ait plus de sièges physiquement dans le sens de la marche. Certains ont gagné au change, d’autre n’ont rien compris et Monsieur 62 devenu 26 s’est plaint au contrôleur qui lui a promis de changer l’affichage au retour. Reste à savoir si cet engagement, pour la rame voyageant de Paris vers Charleville, n’est pas à nouveau défavorable pour Monsieur 26 redevenu 62. Heureusement, Air Napoléon a l’immense privilège de ne proposer que des sièges dans le sens de la marche, et ça ne m’étonnerait pas que bientôt un artifice marketing nous vante cet avantage gracieusement offert.
On peut aussi fixer des règles temporelles. Pour les vols de moins de deux heures, par exemple, certaines compagnies ne serviront pas de plat chaud (voire pas de plat du tout) en expliquant que le temps est insuffisant pour assurer un service complet. D’autres, comme je l’ai récemment constaté sur la compagnie boutique Hankok Airways qui relie BKK et Samui en quarante minutes, ont pour règle de savoir-vivre d’offrir un repas à chaque vol, avec une salade, un plat chaud, un dessert, et toutes sortes de sauces associées dont celle qu’il ne faut pas goûter sous peine de rougir, chauffer et exploser en vol tant elle est épicée. Reste que cette règle repose sur l’hypothèse que chaque passager pratique communément le gobage sans mâcher, du moins s’il veut bénéficier du chariot duty free qui est proposé dix minutes avant la fin du vol, c’est-à-dire à peu près au moment où je finissais de manger mon entrée.
Et tant qu’à promulguer des règles, cocasses ou absurdes, certaines compagnies choisissent d’instaurer carrément de nouvelles « réglementations ». Voilà quelques années que je dénonce l’inexactitude (particulièrement mesquine, puisque la compagnie maintient volontairement un affichage un peu plus généreux que ce qu’elle offre réellement à ses clients) du barème en ligne Miles&Blues d’Air Napoléon. Je constate ce WE qu’il y a enfin eut du changement, même si les montants restent désespérément inchangés et incorrects… plutôt que de corriger les taux promis aux clients avant le vol, pour qu’ils correspondent aux montants de miles transcrits après le vol, Air Napoléon a ajouté un avertissement sous le barème : « La réglementation sur l’accumulation de miles Miles&Blues est sujette à toute modification. Les résultats ne sont donnés qu’à titre indicatif; aucun droit ne pourra en être revendiqué ». Encore un artifice : la réponse produite n’est plus malencontreusement fausse et trompeuse, elle est modifiable à titre indicatif et tellement volontairement trompeuse et malhonnête qu’on signale qu’elle est incorrecte et ne donne aucun droit.
Incontestablement, on peut tout dire avec des règles et des règlementations. Sauf peut-être montrer à ses clients qu’on les respecte… eux, plutôt qu’elles.
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