Les procédures, c’est pour les pros. Chez Air Napoléon, on en fait toujours plus : on les complète avec des concédures. Les médias ont d’ailleurs encore récemment souligné leur grande finesse lors d’un transit imprévu et cocasse d’un avion par Damas.
Toutes les procédures courantes et concédures additionnelles inventées par l’énarchie administrative de la compagnie sont rassemblées dans une documentation en deux volumes : le Manuel des Règles Automatiques (à appliquer sans réfléchir pour développer une relation client sans intelligence) et l’Automatique des Règles Manuelles (à suivre par l’équipage dès que le dédain indiscerné ne produit pas assez d’inconfort). Certes, on dira qu’une décision éclairée autorise le PNC (personnel navigant concéduré) à s’éloigner parfois des règles prédéfinies pour s’inscrire dans la « Miniature de Service ». Mais l’espace qui est ainsi donné, avec quelques bouts de ficelles pour le mettre en œuvre, est régulièrement contraint par de nouvelles concédures qui rendent chaque jour l’initiative personnelle des PNC plus héroïque. Et les équipes au sol, à la vente, au programme de fidélité ou partout ailleurs dans la compagnie se contenteront des règles édictées, sans être autorisées à viser cette notion de Service.
Sans pouvoir ici détailler l’ensemble des règles retenues par la compagnie, il est intéressant de s’attarder sur quelques exemples et leurs impacts.
On connaît à présent bien la nouvelle procédure Sky Hypocrity qui permet de passer plus rapidement les contrôles à l’aéroport pour les passagers Evite Plus. La concédure d’attente des autres passagers du groupe (les collègues ou membres de la famille qui n’en bénéficient pas) est claire : le pax Sky Procéduré n’a qu’à s’installer au salon, où de toute façon les autres n’entreront pas. Il n’y a pas à se plaindre, d’autant que si vous ne vous êtes pas réveillé au milieu de la nuit 30h avant le vol pour bloquer des sièges sur une même rangée pour le groupe entier, vous serez aussi séparés pour le reste du voyage.
La presse a évoqué dernièrement la procédure manuelle qui permet de dépouiller les passagers de leurs liquidités, en toutes devises, pour acheter du kérosène s’il n’y a pas d’autre solution. Une concédure automatique impose de les solliciter sans prendre le temps de réfléchir à une autre solution, qu’on retiendra finalement, pour ainsi bénéficier d’une publicité gratuite dans tous les médias, bêtisiers et retweets fakebookés. On notera que les passagers qui ont donné l’aumône sont eux-aussi quelques peu concédurés !
Air Napoléon acceptera, avec une procédure automatique, l’émission des billets, et le paiement en contrepartie, pour transporter Juan, un enfant sudafricain de presque trois ans, sous assistance médicale, vers un hôpital anglais où il est prévu de le soigner. La concédure manuelle, concrétisée par une vérification des conditions d’âge le jour du vol seulement, l’empêchera néanmoins d’embarquer tant qu’il n’a pas fêté ses huit ans, même si l’absence de traitement qu’implique cette situation réduit grandement ses espoirs de survie. Une forte mobilisation sur la page fakecook de la compagnie, encouragée par une radio d’Afrique du Sud et des membres de la famille de Juan, permettra néanmoins deux jours plus tard de modifier la concédure pour heureusement honorer l’engagement de transport.
Dans un cadre bien plus léger, et à titre de dernier exemple, une procédure automatique prévoit de donner en ligne un barème des miles & blues gagnés sur chaque vol. La concédure correspondante a conduit la compagnie à afficher sous le barème une mention légale précisant qu’il est faux. Enfin, une concédure manuelle permet de concilier le barème publié et celui appliqué en saisissant à chaque vol des passagers qui le demandent, après leur avoir éventuellement adressé quelques messages de refus, un crédit correctif.
Vraiment, le Manuel des Règles Automatiques d’Air Napoléon, c’est un vrai savoir-faire de luxe et de confort… perdus.
De plus en plus confus et de moins en moins drôle.
En tous cas, cher Richard, votre constance à lire ce blog, à le critiquer et a defendre votre compagnie vous fait honneur! Dommage que l ecoute et la remise en question ne soient pas des valeurs « corporate » plus développées…