Quand la compagnie fictive Air Napoléon décrite sur ce blog perd votre bagage, elle vous fait aussi perdre votre temps. Au téléphone d’abord, jusqu’à ce que vous connaissiez par coeur chaque note de la musique d’attente. Dans la paperasserie ensuite, jusqu’à ce que vous rassembliez chaque note d’achat des objets perdus.
Archive pour septembre 2013
La compagnie finlandaise Finnaud a mis en place un programme appelé « Magic Moments » encourageant chaque membre du personnel de bord à jouer d’initiatives pour résoudre un problème ou anticiper les attentes du client. Dans le même temps, la compagnie française Air Napoléon a mis en place un programme appelé « Menace Moments » rappelant à chaque membre du personnel étiqueté « Security-Safety » d’évoquer la police et la justice pour interdire toute mention d’un problème et renvoyer à plus tard le traitement des attentes du client.
Pour tester le programme « Menace Moments », l’équipe en charge de ce blog a d’abord observé la réaction d’une chef de cabine principale d’un appareil long-courrier lorsqu’un passager Bizbiz sur siège toboggan s’installe quelques mètres plus à l’avant sur un siège plat, quoiqu’avec un tout petit écran, de la classe La PlusChère alors entièrement vide et invendue. Nous avons aussi à deux reprises, sur court-courrier cette fois, distribué des bonbons en vol, après le service « sacré-sulé », souhaitant offrir aux passagers quelque chose de nouveau puisque la compagnie est incapable de varier la collation gratuite.
Le résultat est impeccable : catalysé par son chef qui a appelé en juin à « oser » (oser être pénible et tatillon), le personnel Air Napoléon réussit parfaitement le test en réagissant presque toujours agressivement, menaçant à tout va avant même de s’interroger sur les raisons de la démarche, positionnant la relation avec le client dans un désagréable schéma adulte-enfant, dans lequel la compagnie se persuade de tout savoir et tout bien faire, et méprise ostensiblement le client, ses attentes et sa satisfaction, qui ne peuvent avoir aucune valeur, parce que ce n’est qu’un client parmi d’autres. Un client qui s’exprime, c’est « not allowed », comme l’est la cigarette « on any Dalton Flight ».
Un sac à dos noir, avec une poche avant grise, acheté 500 bahts dans un bazar de Bangkok, quartier chinois.
Une casquette avec le logo du Space Needle de Seattle, un peu abîmée car je l’avais gardée pour me baigner dans le grand lac à Salt Lake City.
Un polo rouge marqué First, pour voyager en éco, démarqué lors des derniers soldes au troisième étage d’un grand magasin parisien.
Des tongs de contrefaçon comme on en trouve en Malaisie, un t-shirt sans doute pas plus conforme de la médina de Casa, et un short de bain acquis dans une vente au rabais à Varsovie.
Résumé du premier épisode:
Dimanche il y a deux semaines, mon bagage à l’arrivée d’un vol Genève Paris n’a pas été livré. Tel un Objet Volant Non Localisé, on m’a successivement dit qu’il était à Santiago, Paris, Genève, Wuhan, puis qu’on n’en savait rien mais qu’on allait me rappeler.
Ainsi samedi dernier, Alexandre me promettait qu’il rappelerait avant la fin de la journée. Seule la mort pouvait l’en empêcher.
Sans nouvelle, j’ai appelé le service bagages le dimanche à 18h pour présenter mes condoléances. Joël a eu l’air surpris, a pris ma référence de bagage perdu (CDGAN39794), a diffusé cinq minutes de musique de supermarché et m’a annoncé fièrement que mon bagage non livré le dimanche précédent était désormais retardé d’au moins une semaine. Face à tant de perspicacité, j’ai demandé si le bagage avait été scanné au départ de GVA et/ou à l’arrivée à CDG, et Joël m’a indiqué qu’on avait perdu toute trace juste après le dépôt au guichet d’enregistrement à Genève. Logiquement, le bagage devait donc traîner quelque part dans le hangar des bagages perdus à Genève. Mais pour plus de sûreté on regardait aussi dans celui de Paris. Dans tous les cas, le retrouver prend du temps car les hangars sont grands. Et qu’en plus personne n’est sûr que mon sac soit dedans.
Lundi soir, j’ai appelé encore le service bagages, où Margot m’a expliqué que mon sac était noir avec une poche grise, qu’il avait été perdu un dimanche, que j’habitais à Waterloo mais que j’avais aussi donné une adresse de livraison à Paris valable jusqu’au 30 septembre, parce que Valérie dans l’épisode 1 avait traduit « c’est mon bureau, vous pouvez y livrer le bagage en journée » par « adresse temporaire jusqu’au 30 septembre », et que le litige portait sur le retard d’un bagage entre Genève et Paris. Je pense que répéter les informations qui ont été données par le passager au moment de la déclaration de non livraison du bagage doit rassurer le service bagages sur sa capacité à maîtriser les dossiers. J’ai expliqué à Margot que je savais tout ça, mais qu’au bout d’une semaine je commençais à racheter certains objets « retardés », comme un rasoir électrique, et voulais connaître les modalités de compensation. Margot m’a indiqué que je disposais d’une enveloppe de 50 ou 100 euros pour les besoins de première nécessité. Air Napoléon considère donc qu’au bout d’une semaine on traite la première nécessité. Margot a rétorqué que, compte tenu du délai, je pouvais peut être aller jusqu’à 500 euros. Il suffisait de demander par mail au service clientèle avant chaque achat. Ou d’envoyer la facture après chaque achat, mais alors sans être sûr qu’elle soit acceptée. J’ai demandé à Margot si c’était OK pout racheter un rasoir électrique puisque j’en ai déclaré un dans l’inventaire des objets de mon bagage. Margot a répété que c’était au service clientèle de décider. J’ai demandé si je pouvais racheter des cadeaux pour mes neveux, car samedi c’est le baptême de l’un, l’anniversaire de l’autre et le troisième est mon filleul. Margot a répété que c’etait au service clientèle de décider. J’ai fait remarquer à Margot qu’elle ne travaillait sans doute pas au service bagages depuis le matin même, qu’elle avait peut être une idée des barèmes du service clientèle fermé à cette heure. Margot a cité différents montants de 100, 500 ou 5000 euros puis a dit que de toute façon il fallait que je contacte Samuel, qui est le responsable du suivi de mon bagage, à partir de 7h30 le lendemain.
Monsieur le Directeur Régional,
Passager fréquent de votre compagnie, je voudrais avant tout vous féliciter pour l’excellence de votre offre, notamment en Belgique, pour votre souci particulier du client et de son confort, ainsi que pour les progrès continus qui font qu’Air Napoléon est aujourd’hui, et je l’espère pour longtemps, à la pointe du transport aérien. Soucieux néanmoins que vous conserviez toujours cette place de leader incontestable, je voudrais tirer de mon expérience ces dernières années sur vos lignes, quelques idées de services complémentaires ou d’aménagements que vous pourriez étudier. Je me réjouirais que ces propositions puissent vous être utiles, et ainsi profiter tant au confort et à la satisfaction de tous, qu’aux succès futurs de votre grande compagnie.