Archive pour juin 2015

18 juin 2015 #waterloo #napoleon

Monsieur Begougne,WATERLOO

J’ai commencé à écrire ce message le 18 juin 2015 tandis que Waterloo était au cœur de l’actualité. Pour moi qui y suis domicilié, cela me semblait une bonne date pour faire un point sur le courrier que je vous ai transmis en mars il y a deux ans, parlant de votre démarche pour relever la compagnie « Air Napoléon » en des termes liés aux batailles de l’empire en déclin.

Je me suis assez vite arrêté car de toute façon cela ne sert à rien. Et d’ailleurs je ne vous enverrai pas ce qui suit.

J’avais d’abord pensé reprendre chaque idée, que je vous proposais alors pour chaque mois de 2013, sur base de mon expérience certes personnelle mais plus transversale que la vision départementalisée de votre personnel. Je me réjouis en effet que certaines pistes aient été mises en œuvre. Cela signifie sans doute qu’elles n’étaient pas aussi déplacées que cela a été dit quand je les ai formulées. Et surtout que je me trompais quant à l’immobilisme de la compagnie.

Ainsi, vous avez rénové des salons et cherchez à en changer régulièrement les prestations. Certes ce n’est que partiel et le personnel en porte est d’autant plus désintéressé de ce qui se passe à l’intérieur que son management se désintéresse de ce que leur transmettent les clients, mais c’est un bon départ.

Le programme de fidélité Miles&Blues a simplifié ses règles et barèmes : je suis sûr que cela contribue à le rapprocher un peu des clients. Et me réjouis de votre dernière enquête en ligne qui laisse un peu de place à la libre expression – au milieu de questions hypocrites où l’on demande de classer certains services Miles&Blues en commençant par le meilleur, sans pouvoir dire qu’on les trouve tous soit nativement inutiles (la newsletter publicitaire gratuite) soit intéressants mais tellement mal mis en œuvre qu’ils sont en pratique inutiles (le priority tag bagage).

Vous changez enfin vos collations à bord, mettant momentanément fin à dix ans de lassitude du personnel et des voyageurs réguliers. Le 18 juin j’ai même reçu dans un mailing de votre compagnie l’annonce d’un changement des collations sucré-salé tous les quinze jours pour vos vols point à point. Il ne reste qu’à ajouter un trolley de snacks payants et on pourra se restaurer plus agréablement à bord.

Bref vous remontez au classement Skytaxe. Je ne suis pas sûr qu’il soit parfait, je suis même sûr qu’il ne l’est pas, mais cela montre le chemin parcouru et je pense qu’on peut féliciter la compagnie pour cela.

Néanmoins cette année encore, Napoléon n’a pas gagné à Waterloo. Vous annoncez de nouveaux efforts de productivité indispensables, sinon des fermetures de lignes, sinon une faillite rapide. Et j’ai pour ma part voyagé en priorité avec les prussiens, les britanniques et leurs alliés. C’est bien pourquoi il n’est pas utile de vous envoyer mon message.

D’une part parce que je suis sûr désormais, après tant d »années d’absence de remise en question, que la compagnie a pris conscience que la situation ne peut être résolue sans changer, Il n’est plus utile de vous dire et redire comme je l’ai tant fait que vos problèmes ne viennent pas des autres (les méchants low costs, les tricheurs du Golfe, l’avide gestionnaire d’aéroport…) mais de la compagnie elle-même.

Ensuite parce que les bonnes compagnies vont à l’écoute de leurs clients ; et si la vôtre a suffisamment progressé, vous viendrez me lire directement ici, sans que je n’ai rien à vous envoyer. Bien sûr vous ne lirez pas directement mes textes, mais si la compagnie est enfin décidée à abandonner ses fausses certitudes, vous prendrez la peine de lire l’un ou l’autre des retours d’expérience de vos passagers qui ne vous placent pas au sommet de Skytaxe. Vous chercherez les plus insatisfaits, les clients déçus, les voyageurs partis chez d’autres. Ceux qui associent air, france et médiocre ; ou air, france et déclin ; ou d’ailleurs air, france et grève. Ceux que la compagnie a perdus non pas à cause des autres comme elle trop longtemps voulu le croire, mais à cause d’elle.

Il est difficile de changer la culture d’une entreprise, centrée sur elle-même plutôt que sur le client, tournée vers sa grandeur passée plutôt que porteuse d’avenir… persuadée qu’on ne peut voir Napoléon que comme un grand homme qui a construit l’Europe à l’image de la France, sans admettre que c’étaient avant tout un petit dictateur sanglant dont on a été bien contents de se débarrasser.

Ah si Napoléon avait gagné à Waterloo… Air Napoléon serait alors incontestablement la meilleure compagnie de l’Empire !


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